Le royaume de la nécessité
L’être humain est, par nature, contraint à travailler pour subvenir à ses besoins. La liberté n’est possible qu’en dehors de ces contraintes matérielles et nécessaires.
Le royaume de la liberté commence seulement où l’on cesse de travailler par nécessité et opportunité imposée de l’extérieur ; il se situe donc, par nature, au-delà de la sphère de la production matérielle proprement dite.
De même que l’homme primitif doit lutter contre la nature pour pourvoir à ses besoins, se maintenir en vie et se reproduire, l’homme civilisé est forcé, lui aussi, de le faire, et de le faire quels que soient la structure de la société et le mode de la production.
Avec son développement s’étend également le domaine de la nécessité naturelle, parce que les besoins augmentent ; mais en même temps, s’élargissent les forces productives pour les satisfaire. En ce domaine, la seul liberté possible est que l’homme social, les producteurs associés règlent rationnellement leurs échanges avec la nature, qu’ils la contrôlent ensemble au lieu d’être dominés par sa puissance aveugle, et qu’ils accomplissent ces échanges en dépendant le minimum de force et dans les conditions les plus dignes, les plus conformes à leur nature humaine.
Mais cette activité constituera toujours le royaume de la nécessité. C’est au-delà que commence le développement des forces humaines comme fin en soi, le véritable royaume de la liberté qui ne peut s’épanouir qu’en se fondant sur l’autre royaume, sur l’autre base, celle de la nécessité.
L'essentiel
Il y a, dans le travail, une part nécessairement pénible dont nous sommes esclaves. C’est le travail qui est destiné à la production matérielle et la réponse à nos besoins. Marx appelle « royaume de la nécessité » tous les aspects de notre vie où c’est ce travail contraint qui gouverne notre vie.
La liberté, elle, ne commence qu’en dehors de ce royaume. Là on l’on peut travailler par plaisir, ou choisir de ne pas travailler du tout.
Pour être plus libres, il y a donc une seule possibilité : restreindre autant que possible le « royaume de la nécessité », c’est-à-dire l’emprise que le travail forcé a sur nos vies.
Or, avec les récents progrès de la technique (notamment agricole et industrielle), ce travail forcé devrait déjà avoir été grandement réduit, grâce au travail des machines. Mais ce n’est pas ce que l’on observe aujourd’hui.
Car les besoins des êtres humains ont augmenté avec leur capacité à produire. Et la pression que le travail exerce sur eux n’a donc pas pu diminuer.
Des ressources pour aller plus loin
Le travail forcé
« Un homme qui ne dispose d’aucun loisir, dont la vie tout entière, en dehors des simples interruptions purement physiques pour le sommeil, les repas, etc., est accaparée par son travail pour le capitaliste, est moins qu’une bête de somme. C’est une simple machine à produire de la richesse pour autrui, écrasée physiquement et abrutie intellectuellement. »