La perception de la durée

Nous avons conscience de la durée des choses parce que nous observons la successions des idées qui s’enchaînent dans notre esprit.

Les notions de succession et de durée ont pour origine une réflexion sur l’enchaînement des idées que l’on voit apparaître l’une après l’autre dans l’esprit ; cela me paraît évident : on n’a en effet aucune perception de la durée, sauf si l’on considère l’enchaînement des idées qui se succèdent dans l’entendement.

Quand cette succession d’idées cesse, la perception de la durée cesse avec elle ; chacun l’expérimente en lui quand il dort profondément, que ce soit une heure ou un jour, un mois ou une année ; il n’a aucune perception de cette durée des choses tant qu’il dort ou ne pense pas : elle est totalement perdue pour lui. Entre le moment où il arrête de penser et celui où il recommence, il lui semble ne pas y avoir de distance.

Il en serait de même pour une personne éveillée, je n’en doute pas, s’il lui était possible de garder une seule idée à l’esprit, sans changement ni variation ; quelqu’un qui fixe attentivement ses pensées sur une chose et remarque très peu la succession des idées qui passent en son esprit, laissera passer sans la remarquer une bonne partie de la durée : tant qu’il sera pris par cette contemplation stricte, il croira que le temps est plus court.

[…] Il est donc pour moi très clair que les hommes dérivent leurs idées de la durée de leur réflexion sur l’enchaînement des idées dont ils observent la succession dans leur entendement ; sans cette observation, ils ne peuvent avoir aucune notion de durée, quoi qu’il arrive dans le monde.

Locke, Essai sur l'entendement humain

L'essentiel

Notre première expérience du temps, c’est celle de la durée, c’est-à-dire du « temps qui passe« .

Toutefois, on ne fait pas l’expérience directe de la durée. C’est plutôt un phénomène qui accompagne notre esprit lorsqu’il est éveillé et attentif.

Une idée apparaît, puis une autre, et celles-ci s’enchaînent plutôt que de se superposer. Ainsi, c’est en observant cet enchaînement que nous avons une première sensation de ce qu’est la durée.

Une autre expérience, très courante, vient confirmer cette intuition. Quand nous sommes endormis ou très concentrés sur une seule chose, le « flux des idées » n’est plus au premier plan de notre esprit, et nous avons donc la sensation que le temps s’écoule plus vite.

Des ressources pour aller plus loin

Le temps vécu

« La connaissance de l’homme ne saurait s’étendre au-delà de sa propre expérience. »

– Locke, Essai sur l’entendement humain

Podcast

John Locke : Une vie, une oeuvre

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Locke : l’invention de la conscience

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Article

Définition philosophique de la durée

Philosophie Magazine, 5MIN

Texte Intégral

Essai sur l’entendement humain

LOCKE

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