Le méchant est un grand enfant
La nature fait de nous des êtres violents, colériques et peureux. C’est l’éducation et la raison qui font de nous des adultes et nous rendent capables de faire le bien.
À moins que vous ne donniez aux enfants tout ce qu’ils désirent, ils pleurent, se mettent en colère, frappent même leurs parents et tiennent de la nature ce caractère qui les fait agir ainsi ; et pourtant ils ne sont pas fautifs ni méchants, d’abord parce qu’ils ne peuvent pas nuire, ensuite parce qu’ils sont dispensés de tout devoir, n’ayant pas l’usage de leur raison.
Si, devenus adultes et ayant acquis des forces qui les rendent capables de nuire, ils continuent de se comporter ainsi, alors ils en viennent à être méchants et à être appelés ainsi. De sorte qu’un méchant est presque la même chose qu’un enfant vigoureux ou qu’un homme qui a l’âme d’un enfant, de sorte aussi que la méchanceté est la même chose qu’un manque de raison à un âge où elle arrive ordinairement aux hommes, quand la nature a été guidée par l’éducation et l’expérience des préjudices.
Donc à moins de dire que les hommes sont rendus méchants par la nature parce qu’ils ne possèdent naturellement ni l’éducation, ni l’usage de la raison, il faut reconnaître que les hommes peuvent éprouver naturellement de la convoitise, de la crainte, de la colère et les autres passions animales, sans être néanmoins rendus méchants par la nature.
L'essentiel
Les enfants sont merveilleux, n’est-ce pas ?
Pourtant, la plus simple observation est sans appel : qui que soient leurs parents, les enfants sont peureux, colériques et agressifs.
Pourtant, on ne leur en veut pas. On ne les considère pas comme coupables ou mauvais. Ils ne font qu’exprimer leur nature, sans avoir conscience des conséquences de leurs actes.
On peut donc en déduire, pour Hobbes, que les adultes ayant le même comportement n’ont pas eu une mauvaise éducation : ils n’ont pas eu d’éducation du tout. Et leur nature continue à s’exprimer sans limites.
Des ressources pour aller plus loin
La brutalité naturelle
« Les désordres des méchants contraignent ceux mêmes qui sont les meilleurs de recourir, par le droit d’une légitime défense, à la force et à la tromperie. »